La Direction de l’Animation de la Recherche, des Etudes et des Statistiques (DARES), émanation du Ministère du Travail, vient de publier une enquête sur les risques professionnels, menée en 2010 auprès de 22 millions de salariés en France, via la médecine du travail. Sans surprise, cette étude montre que les expositions aux risques professionnels varient fortement d’un secteur d’activité à l’autre, en raison des différentes contraintes et rythmes de travail. Les agriculteurs sont plus souvent exposés à des contraintes physiques et organisationnelles, auxquels ils sont néanmoins mieux préparés que d’autres. Nous nous invitons à consulter les conclusions du rapport en pièce jointe. En voici les principaux enseignements pour la profession agricole :
Des horaires lourds et plus contraignants
Tout d’abord, l’agriculture se distingue par ses horaires difficiles: 20% des agriculteurs ont travaillé plus de 40h la semaine précédente. Les agriculteurs sont deux fois plus nombreux que la moyenne des autres salariés à effectuer des astreintes (19,5% contre 10%), et travaillent aussi plus souvent le dimanche (49 % contre 33 %). Ces conditions de travail s’expliquent par les longues journées d’été, où l’on peut travailler pendant plusieurs semaines avec des cadences élevées (périodes de moissons et récoltes), et par la soumission aux conditions météorologiques, qui dictent le rythme des travaux.
Un travail physiquement éprouvant
Outre les horaires difficiles, les agriculteurs sont également soumis à des contraintes physiques plus difficiles que dans d’autres secteurs d’activité.
Ainsi, 54% des agriculteurs sont soumis à au moins une contrainte physique intense (contre 38% des autres salariés). Ils sont également soumis à des contraintes posturales pénibles (position à genoux, maintenir ses bras en l’air, être accroupi ou en torsion…): 37% des agriculteurs rencontrent ces postures douloureuses 2 heures ou plus par semaine, contre 20% chez les autres salariés.
Les agriculteurs sont également deux fois plus nombreux à répéter les mêmes gestes à une cadence rapide 20 heures ou plus par semaine (8% contre 16%).
Par ailleurs, 10% des salariés de l’agriculture sont soumis à un bruit élevé (c’est-à-dire une nuisance sonore supérieure à 85 dB(A) pendant 20 heures par semaine ou plus), soit un taux plus de deux fois supérieur à la moyenne des salariés. 38% des agriculteurs sont confrontés à un bruit nocif au moins une fois par semaine.
Un contact fréquent avec des produits dangereux
Outre les gestes et les postures, les agriculteurs sont plus soumis à des produits chimiques que dans les autres professions: 43% des agriculteurs sont en contact avec ces substances, notamment les produits phytosanitaires, contre 33% pour l’ensemble des salariés. Ils sont également plus exposés aux agents chimiques cancérogènes (14% alors que la moyenne est de 10%).
Les agriculteurs sont également plus en contact avec des agents biologiques (37% contre 22% pour la moyenne des salariés), en raison de leur contact avec les animaux (« réservoir animal »).
Un métier dangereux, des responsabilités plus lourdes
Ce n’est donc pas une découverte, l’agriculture est un métier dangereux de par ses nombreuses situations à risques, mais également parce que les conséquences d’une erreur dans le travail sont plus graves pour les agriculteurs et leur environnement (les travailleurs hospitaliers mises à part).
Dans 57% des cas (contre 39% pour la moyenne nationale), les salariés agricoles estiment qu’une erreur dans leur travail peut porter atteinte à leur sécurité et à celle des autres. Ils sont également conscients des conséquences financières d’une erreur sur l’entreprise, qu’ils estiment potentiellement graves à 65%.
Les agriculteurs plutôt mieux informés
Néanmoins, l’agriculture est l’un des secteurs où les salariés signalent moins souvent qu’ailleurs avoir des difficultés pour « effectuer leur travail correctement » : 9% des salariés agricoles estiment manquer de moyens matériels (contre 17% pour les autres salariés) et seulement 7% estiment manquer d’informations (contre 15% chez les autres salariés). Ces chiffres s’expliquent par le fait que beaucoup d’agriculteurs sont chef d’exploitation ou rattaché à sa famille.
L’entraide est également plus présente en milieu agricole: les salariés déclarent moins souvent que les autres manquer de soutien en cas de difficulté ou ne pas recevoir la considération qu’ils méritent, notamment de leurs supérieurs.
Lien : Etude de la DARES [4]
Liens :
Un bétail stressé augmente le risque de blessure pour les éleveurs [10]La maladie du « poumon de fermier » [11]
Machines agricoles : moins d’accidents, mais plus graves [12]